Texte des anarchistes prisonniers politiques Pola Roupa et Nikos Maziotis

Appel au soutien financier de notre entourage familial

28/5/2023

            Nous sommes 2 prisonniers politiques, membres de la Lutte Révolutionnaire (LR), une organisation anarchiste armée qui a opéré entre 2003 et 2017. Elle a revendiqué la responsabilité de 18 actions/attaques contre des cibles liées au régime politique et économique, c’est à dire à l’État et au Capital. La LR a revendiqué la responsabilité d’attentats à la bombe et d’attaques armées contre les ministères des Finances et du Travail, la Bourse d’Athènes, la Banque de Grèce et le bureau du Fonds Monétaire International ainsi que des banques, des commissariats de police et des policiers MAT[1]. La LR a également revendiqué un attentat contre le ministre de l’ordre public, et l’attentat à la roquette antichar contre l’ambassade des États-Unis à Athènes. De plus, la camarade P. Roupa a tenté de détourner un hélicoptère en 2016 pour aider à l’évasion de la prison du camarade N. Maziotis (ainsi que d’autres prisonniers) afin de poursuivre l’action de la LR.

            Nous avons également perdu un camarade, Lambros FOUNTAS, tué le 10 mars 2010 lors d’un affrontement avec la police, pendant une action de l’organisation. À cette époque, la LR avait lancé des actions durant la crise financière mondiale et contre l’imposition des Accords de Prêt en Grèce.

            Depuis les premières arrestations en 2010, nous avons revendiqué la responsabilité politique de notre participation à la LR et avons défendu, publiquement et dans tous les procès qui ont suivis, notre action et toutes les actions de l’organisation. Nous avons défendu la politique d’action révolutionnaire armée contre l’État et le Capital. Nous avons défendu l’objectif de la Révolution Sociale de renverser le système de pouvoir économique et politique afin de le remplacer par une organisation sociale sans classes ni État, basée sur une confédération de communes.

            Au cours de notre action et à deux reprises, une récompense était placée sur nos têtes. La première fois, en 2007, immédiatement après l’attaque contre l’ambassade de États-Unis à la roquette antichar, le State Departement[2] a mis en place une récompense de 1.000.000 dollars et l’État grec une autre de 800.000 euros, pour les membres de la LR. La deuxième fois, en 2014, lorsque l’État Grec a mis en place une récompense de 1.000.000 d’euros pour chacun de nous deux. Ces récompenses ont été mises en place dès que nous étions passés dans la clandestinité après être sortis de la prison en 2011. Cette « libération » s’était produite sur la base de la Constitution grecque prévoyant que personne ne peut être détenue en détention provisoire plus de 18 mois sans être encore jugée.

            Cette deuxième récompense, mise en place par l’Etat Grec en 2014, est arrivée après l’attentat à la bombe perpétré en 2014 par la LR, avec une voiture piégée contenant 75 kilos d’explosifs, contre le bâtiment de la Direction de Surveillance de la Banque de Grèce à Athènes où se trouvait également le bureau du FMI. Cette action était une réponse aux Accords de Prêt que l’État grec avait conclus depuis 2010 suite aux pressions des institutions supranationales : Banque Centrale Européenne, Commission Européenne, Fonds Monétaire International (La Troïka). Cette attaque a été revendiquée par la « LR-Commando Lampros FOUNTAS », action pour laquelle nous avons été condamnés à la réclusion à perpétuité en première instance, une peine qui a été annulée par la cour d’appel.

            Après 8 longs procès (4 procès en première instance et 4 en cours d’appel) et pour les 18 actions de la LR, nous avons été condamnés à plusieurs dizaines d’années de prison, qui ont débouché à 20 ans d’incarcération pour chacun de nous.

            Mais en dehors de notre condamnation, nous avons également été confrontés à une autre dimension plus odieuse de la répression étatique. En effet, l’État grec a ciblé notre propre enfant dans le cadre de sa guerre menée contre nous-mêmes. Lorsque nous avons été arrêtés pour la première fois en 2010, la camarade  P. Roupa était enceinte de 6 mois et notre fils est né en prison quelques mois après. En 2012, avant la fin du 1er procès contre la LR[3]  où nous avons été condamnés par contumace à 50 ans de prison, nous sommes passés dans la clandestinité.

            Durant toutes ces années notre fils est resté avec nous, jusqu’à l’arrestation du camarade N. Maziotis en juillet 2014 et de la camarade P. Roupa en janvier 2017. Lorsque P. Roupa a été arrêtée, la police, au lieu de remettre notre fils à nos proches, l’a transféré, sur ordre du procureur, dans un service psychiatrique fermé sous surveillance policière et sans autorisation de visites les premiers jours. L’objectif de l’État grec était de mettre le maximum de pression sur nous et de rompre la relation parentale que nous entretenons avec notre fils. C’est pour cette raison que l’État grec nous a retiré la garde de notre fils dès le moment où la camarade P. Roupa a été arrêtée, faisant référence à nos actions et nos condamnations.

            Cet événement sans précédent a eu un écho très négatif dans la société. Après quelques jours de grève de la faim et de la soif et les mobilisations des camarades, l’État grec a remis finalement notre fils à notre entourage familial. Mais, par la suite, une décision de justice nous a retiré l’autorité parentale.

            Nous en sommes déjà, le camarade N. Maziotis à plus de 10 ans de prison et la camarade P. Roupa à près de 8 ans. Nous avons le droit de demander une libération conditionnelle au bout de 3/5 de la peine prononcée, soit au bout de 12 ans d’incarcération (où le temps de travail en prison peut être inclus).

            Le camarade N. Maziotis a déjà atteint cette limite (pour pouvoir demander la libération conditionnelle) depuis plus d’un an, en travaillant dans la prison. Mais la Commission qui s’occupe des libérations conditionnelles lui a refusé par deux fois la demande de libération conditionnelle et ignore sa troisième demande.

            En plus de la peine de 20 ans, nous avons également été condamnés à des amendes exorbitantes. Ces derniers temps, ces «factures» d’État sont passées au premier plan, y compris les frais de justice (8 procès au total) ainsi que les amendes et les frais de justice des tribunaux militaires concernant notamment le camarade N. Maziotis (en raison de son Refus Total[4] du service militaire à ses 18 ans) lorsque il avait été appelé pour servir dans l’armée grecque. Au total, le montant de ces dettes atteint 70.000 euros.

            Camarades, nous avons consacré nos vies à la lutte contre l’État et le Capital, à la lutte pour la Révolution et nous avons payé et payons encore un lourd tribut – comme nous l’avions prévu lorsque nous avons fait nos choix.

            Les difficultés causées par l’incarcération de longue durée, comme dans notre cas, ne concernent pas seulement ceux qui la vivent, mais aussi leur environnement familial, surtout s’il s’agit d’enfants mineurs et de personnes âgées. Ces difficultés étaient et sont les plus importantes pour nous. Surtout en ce moment où une de nos proches fait face à des graves problèmes de santé. Plus précisément, la mère de la camarade P. Roupa, grand-mère de notre fils ayant la garde de notre enfant, est une personne âgée avec de très graves problèmes de santé. C’est grâce à elle et à la sœur de la camarade P. Roupa (qui a également la garde) que notre fils n’a pas fini en institution et grandit dans un environnement stable et sécure.

            L’aide financière qui contribuera au traitement des problèmes de santé graves et au soutien de nos proches est la chose la plus importante pour nous en ce moment.

Pola ROUPA, 3e quartier de la prison pour femmes de Thèbes

Nikos MAZIOTIS, 4e quartier de la prison de Domokos

Les prisonniers politiques de la Lutte Révolutionnaire


[1]    MAT : l’équivalent de CRS

[2]    L’équivalent du Ministère des Affaires Étrangères

[3]    Qui a duré de 2011 à 2013.

[4]    Refus Total de Service Militaire : il s’agit d’une tactique des camarades en grèce qui refusent de se présenter à l’armée dans le cadre du service militaire obligatoire.

Σχολιάστε